Face au contexte inflationniste, quelles solutions les maires peuvent-ils adopter vis-à-vis de leurs cocontractants ?

Fiche juridique – Face au contexte inflationniste, quelles solutions les maires peuvent-ils adopter vis-à-vis de leurs cocontractants ?

Face au contexte inflationniste d’ampleur inédite et à la crise exceptionnelle que traversent certains contrats publics, le Cabinet Symchowicz-Weissberg & Associés explore les solutions que les maires peuvent adopter vis-à-vis de leurs cocontractants.

  1. Première solution : la modification du contrat

Face à la situation de crise, le ministre de l’Économie a saisi le Conseil d’État qui, le 15 septembre 2022, a rendu son avis « relatif aux possibilités de modification du prix ou des tarifs des contrats de la commande publique et aux conditions d’application de la théorie de l’imprévision ». Cet avis confère une marge de manœuvre aux parties en ouvrant un large périmètre de modification contractuelle et en recensant plusieurs fondements juridiques utilisables.

1.1 Un large périmètre de modifications envisageables qui restent une faculté pour l’administration

Le Conseil d’État valide la modification « sèche » des conditions financières, en indiquant que « rien n’empêche que les modifications des marchés et contrats de concession portent uniquement, en vue de compenser les surcoûts que le titulaire ou le concessionnaire subit du fait de circonstances imprévisibles, sur les prix ou les tarifs prévus au contrat ainsi que sur les modalités de leur détermination ou de leur évolution ». Il en est de même concernant la durée du contrat puisque des prolongations « sans nouvelle procédure de mise en concurrence, sont possibles si elles peuvent être regardées […] comme des modifications rendues nécessaires par des circonstances imprévisibles ou des modifications non substantielles ou de faible montant ».

Le Conseil d’État indique que « s’il est toujours loisible à l’entrepreneur, en cas de circonstances imprévisibles bouleversant l’économie du contrat, de présenter à l’autorité contractante une demande de modification des clauses financières du contrat, il n’a pas de droit à obtenir la révision de ces clauses ».

1.2 Les fondements non invocables ou d’une portée limitée : la clause de réexamen, les modifications non substantielles ou de faible montant

Les articles R. 2194-1 et R. 3135-1 du code de la commande publique prévoient la possibilité d’insérer dans le contrat des « clauses de réexamen ou d’options claires, précises et sans équivoque » pour modifier le contrat, et ce « quel que soit leur montant ». Mais encore faut-il qu’elles indiquent « le champ d’application et la nature des modifications ou options envisageables, ainsi que les conditions dans lesquelles il peut en être fait usage ». En réalité, si beaucoup de contrats contiennent des clauses de revoyure ou de réexamen, celles-ci s’avèrent en général insuffisamment précises pour sécuriser juridiquement une modification contractuelle d’ampleur. Même si un examen de chaque contrat s’impose pour y déceler de telles clauses.

Enfin, en ce qui concerne les modifications de faible montant, le Conseil d’État indique que « les parties sont libres de procéder, si elles le souhaitent d’un commun accord, à la compensation de toute perte subie par le cocontractant même si cette perte ne suffit pas à caractériser une dégradation significative de l’équilibre économique du contrat initial ». Nul besoin de démontrer une circonstance imprévisible ou un bouleversement de l’économie du contrat. Il incombe cependant à la commune de s’assurer, compte tenu de ses besoins propres, de la nécessité de telles modifications et d’éviter que, malgré leur faible montant, elles aient pour effet de compenser, même partiellement, la part de l’aggravation des charges qui n’excède pas celle que les parties avaient prévu ou auraient dû raisonnablement prévoir.