Interview croisée : Trois Maires franciliens reviennent sur la nouvelle carte intercommunale

Depuis le 1er janvier 2016, la nouvelle carte des intercommunalités est fixée en Ile-de-France. A ce titre, Sylvine Thomassin, Maire de Bondy et Secrétaire Générale de l’AMIF, Sébastien Meurant, Maire de Saint-Leu-la-Fôret et Vice-Président de l’AMIF, et Bernard Gauducheau, Maire de Vanves et membre du Conseil d’Administration de l’AMIF, ont accepté de revenir sur les enjeux et les difficultés que pose la mise en place des nouvelles structures de coopération intercommunale. Leurs témoignages soulignent le travail qu’il reste à accomplir pour rendre ces entités pérennes et optimales.

Quels sont les enjeux prioritaires de la refonte de la carte intercommunale ?

Sylvine Thomassin : l’enjeu qui détermine tout le reste est : ne rien faire sans les Maires, ces élus vers qui les citoyens se tournent et qui ont tous les jours les mains dans le cambouis. Nous le réaffirmons, pas pour défendre notre chapelle, mais parce que c’est tout simplement essentiel pour réaliser une refonte consensuelle qui a du sens pour la population. L’adhésion des élus locaux doit constituer un critère de succès autrement plus important que la mise en place d’intercommunalités qui reposerait uniquement sur une approche quantitative.

Sébastien Meurant : L’enjeu prioritaire est de dégager un projet politique sur un territoire qui souvent a été découpé par l’Etat et qui ne correspond pas ni à une réalité historique ni à un bassin de vie. Donc, c’est un territoire non identifié par le citoyen. Ce projet doit se concrétiser en permettant la réalisation d’économies. Pourtant, alors que cette réforme a été créée en partie pour participer à la baisse des dépenses publiques, nous nous rendons compte qu’elle entraine des surcoûts avec la superposition de plusieurs administrations et le recrutement d’éléments nouveaux.

Bernard Gauducheau : Le principal enjeu de cette refonte a été de finaliser la carte des intercommunalités en Ile-de-France afin que toutes les collectivités soient rattachées à un Etablissement Public de Coopération Intercommunale. Ainsi, depuis le 1er janvier 2016, ces nouvelles entités doivent rationnaliser et améliorer l’efficacité du fonctionnement des services publics intercommunaux. Reste à voir si elles vont y parvenir…

A quelles difficultés les maires franciliens doivent faire face dans le cadre de cette refonte ?

ST : Chaque territoire a ses spécificités, mais je note qu’en Ile-de-France, en 2016, la question de l’articulation à trouver entre la Métropole du Grand Paris et les grands EPCI de sa périphérie est fondamentale. Sans doute, la MGP sera durablement une instance de régulation et d’arbitrage, centrée sur la planification et la programmation. Les échelons opérationnels doivent rester les communes et les EPT. A cet égard, le modèle de gouvernance reste à construire. Viennent ensuite toutes les questions qui n’intéressent pas vraiment nos concitoyens il faut le dire, mais auxquelles il faudra trouver des réponses en travaillant en bonne intelligence, et ce, peu importe les bords politiques et sans perdre de vue l’essentiel : l’intérêt général. Je pense notamment aux harmonisations fiscales (taux cibles, abattements…), aux harmonisations de compétences, aux impacts sur les ressources humaines, et surtout aux incidences sur la péréquation.

BG : Tout d’abord, la majorité des Maires Franciliens doivent apprendre à travailler dans ces nouvelles structures intercommunales, ce qui nécessite de développer une culture commune de l’action avec des financements publics connaissant des baisses importantes. D’autre part, les Maires doivent répondre aux interrogations de leurs concitoyens qui peuvent être désorientés par la complexité administrative et la superposition du nombre de structures de coopération. Les Maires seront en première ligne pour coordonner le fonctionnement des multiples strates administratives composant l’Ile-de-France.

SM : Cette réforme se fait dans un contexte d’incertitude majeure sur le devenir des départements, communes, métropoles et autres strates. Ajouter à cela les baisses de dotations et le manque de vision de nos dirigeants, il est très difficile de se projeter et de construire une politique ambitieuse pour ces nouveaux territoires.

Quelles sont, selon vous, les pistes d’amélioration à soumettre aux ministres concernés.

ST : Le calendrier serré qui impose la mise en œuvre des fusions le 1er janvier 2017 risque de dicter des passages en force aux préfets. Or, il faut les éviter. On a donc peu de temps pour la concertation et la négociation. Par ailleurs, je fais de la lutte contre les inégalités territoriales, (rurales/urbaines, Est/Ouest, centres/périphéries), la pierre angulaire de toute action, de toute décision, notamment sur les articulations entre les institutions. Il ne faut pas l’oublier, surtout lorsqu’on gravite dans les hautes sphères de l’Etat ! Enfin, il faut de la pédagogie pour tenter d’expliquer et convaincre nos concitoyens sur tous ces changements…Bien sûr, nous faisons notre travail de Maire sur le terrain, mais c’est aussi aux Ministres d’expliquer aux Français et a fortiori aux Franciliens l’intérêt de telles réformes, pour leur territoire et pour eux. Je le dis car pour le moment tout cela est assez opaque pour nos concitoyens qui ont souvent l’impression qu’il s’agit de petits arrangements entre élus et technocrates.

BG : Il est impératif de dresser rapidement un bilan de la nouvelle carte de la coopération intercommunale en Ile-de-France pour mesurer si les établissements qui la composent ont les conséquences positives escomptées en matière d’actions publiques. Il sera nécessaire d’alerter les Ministres concernés sur les éventuels chevauchements entre les compétences et les domaines d’intervention des diverses structures de coopération intercommunale. Les récentes réformes institutionnelles n’ont pas simplifié le fonctionnement et la lisibilité du millefeuille administratif francilien. La nouvelle carte de coopération intercommunale pourra servir au gouvernement à améliorer cette situation.

SM : Il faut abandonner l’idée que plus les territoires sont grands, plus il y a d’économies d’échelle. La proximité est une composante, voire la composante essentielle d’un service public de qualité. Cette proximité doit permettre d’être à la fois plus efficace en termes de qualité/efficacité/Prix. Il faut mettre en place un système de bonus/malus pour les collectivités vertueuses.

Contact presse :

Florian Bachelet
fbachelet@amif.asso.fr – 07 62 40 00 06

Sylvine Thomassin, Maire de Bondy (93), Secrétaire Générale de l’AMIF

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Bernard Gauducheau, Maire Vanves (92), membre du Conseil d’Administration de l’AMIF

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Sébastien Meurant, Maire de Saint-Leu-la-Forêt (95), Vice-Président de l’AMIF

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