La mairie du 9e arrondissement nourrit chaque jour 3 500 écoliers. Delphine Bürkli a fait le pari d’expérimenter la valorisation des biodéchets dès 2014 avec la startup ” Love your waste “. Depuis 2017, les surplus alimentaires sont collectés par une association humanitaire ” Le Chaînon manquant “.
À peine élue Maire du 9e arrondissement en 2014, vous avez mis en place la collecte des biodéchets. Qu’est-ce qui vous a motivé ?
Dans un premier temps, nous avons mis en place la collecte des biodéchets. À titre expérimental la première année, et dès 2015, nous l’avons généralisée avec l’aide d’une startup locale ” Love Your Waste ” qui travaille sur la méthanisation et la production d’engrais à partir des biodéchets ” Love your waste “, c’est d’abord été une belle rencontre avec un habitant du quartier, Jérôme Perrin. Il m’a sensibilisée aux questions de méthanisation. Nous avons été leur premier client. Depuis, ils se sont beaucoup développés et j’en suis très fière. Pour l’anecdote, quand nous avons commencé à mettre en place le tri des biodéchets, nous n’y consacrions pas de budget. Nous avons fabriqué les tables de tri et la signalétique nous-même. L’aventure a commencé avec le système D.
C’est une obligation très coûteuse pour la collectivité ?
Mais c’est aussi très coûteux de mettre en place des usines d’incinération !
D’autres métropoles dans la nord de l’Europe ou en Allemagne travaillent sur ces questions depuis plus de 10 ans. Chez nous, on commence à en parler. À l’échelle du 9ème arrondissement, nous pouvions donner l’exemple en ayant une approche globale. Grâce à nos cantines scolaires, nous proposons une meilleure gestion des déchets alimentaires de la collecte des biodéchets jusqu’à la gestion des surplus alimentaires, lorsque les repas ne sont pas consommés, avec l’Association ” Le Chaînon manquant “.
Comment s’articule le partenariat avec ” Le Chaînon manquant ” ?
Nous cherchions depuis 4 ans une association pour prendre la gestion des surplus alimentaires en charge. C’est très compliqué parce que c’est très normé. Mais grâce à Valérie de Margerie, Présidente du Chaînon Manquant, les repas non consommés dans nos cantines scolaires sont collectés et redistribués dans des conditions optimales. Dans notre cuisine centrale, nous avons un espace réservé au stockage des repas en attente d’être redistribués.
Nous avons réalisé 650kg de dons alimentaires en un an. L’association distribue ces repas en priorité au centre de mineurs migrants qui e trouve dans le 9ème dont j’ai accompagné l’ouverture et qui accueille 50 jeunes par soir. En février dernier, nous avons reçu le Prix des Eco Maires pour cette action solidaire qui s’inscrit dans une démarche de développement durable.
Et une chose en entraînant une autre…
Nous sommes vigilants également quant à la provenance du pain. Nous avons passé un marché avec 3 boulangers du quartier et il n’a pas été facile à monter. Forcément leur pain était un peu plus cher, mais comme le pain est meilleur, il y a moins de gaspillage. On en achète moins et d’ici deux ans, nous aurons lissé le surcoût initial.
Vous privilégiez une approche ” globale “, en quoi consiste-t-elle ?
Nous faisons aussi des ateliers nutrition en lien avec les directeurs d’école pour expliquer aux enfants l’importance de manger varié et nous avons travaillé sur la composition des menus. Nous sommes passés de 5 composants dans le menu à 4 ce qui a permis une réduction du gaspillage de 30% sans toucher à l’équilibre alimentaire ni réduire les quantités. Une fois par semaine, nous proposons un menu végétarien.
Et comment les choses se passent avec les enfants ?
Nous avons commencé avec les écoles primaires, puis les collèges et nous continuons dans les lycées. C’est plus compliqué avec les plus grands mais les plus petits l’ont totalement intégré dans leurs pratiques. Maintenant, ce sont les parents qui nous disent que leurs enfants les poussent à trier et à mettre les déchets dans les bonnes poubelles.
Vos actions préfigurent la cantine et la ville de demain ?
Nous avons changé les pratiques de travail et ils ont la satisfaction de travailler pour le bien de la société. Il faut penser à la ville de demain qui devra produire beaucoup moins de déchets et qui devra leur donner une seconde vie.